– du 13 au 16 août 2019 –
En quittant Trujillo, nous entrevîmes ce que doit être la traversée de la côte péruvienne depuis le nord du pays. A cette époque de l’année, le littoral est recouvert d’une brume tenace, qui ternit le paysage et ne laisse entrevoir l’horizon que certains apres-midis chanceux. Le soleil brûle alors quiconque s’aventure sous ses rayons. L’océan pacifique, depuis la Panam’ entourée de dunes de sable, c’est comme un mirage, inaccessible. L’air est humide et sec à la fois. Si le vent se lève, le sable s’immisce partout, en ennemi indomptable. Au nord de Trujillo, paraît-il, ce sont des kilometres dans ce désert, sans croiser une ville. Rude. Nous n’aurons traversé ce paysage que sur une quarantaine de kilomètres, avant de nous enfoncer dans les dunes, en direction de la Cordillère Blanche. C’était juste après avoir goûté à notre premier « déjeuner en bord de route péruvien » dans une ville de passage peu accueillante. Au menu, c’était soupe de tripes et viande de canard dure et filandreuse à la fois, accompagnée des traditionnels « choclos », variété de maïs dont les péruviens raffolent. Steph, qui pensait avaler un bouillon de blanc d’œuf, eut bon appétit. Mémorable !

Ce soir là, nous plantâmes la tente quelques kilomètres après la bifurcation vers les dunes de sable. Ce qu’on pensait être une carrière de pierres était peut-être bien un site archéologique, en fin de compte. En tout cas, la tente y trouva parfaitement sa place, à temps pour admirer ensemble le merveilleux coucher de soleil sur le désert. Nous étions seules au monde. Et ces couleurs !

Les jours qui suivirent devaient nous mener à Caraz, au pied des plus hauts sommets du Pérou.

On se perdit dans la brume, dans les dunes de sable, puis dans les champs de maracuyas d’une immense et lumineuse vallée verdoyante cernée de sommets rougeâtres, avant de s’enfoncer dans un profond canyon, qui se rétrécissait à chaque coup de pédale.

A notre tour d’être cernées, par de vertigineuses montagnes dans lesquelles nous pouvions lire toute l’histoire des Andes. C’était si beau. Sauf les bleds croisés en chemin. Quand on a commencé à préférer planter la tente plutôt que de dormir dans les taudis trouvés en bord de route, on a compris que le Pérou, ce s’rait pour le meilleur et pour le pire ! Hebergements-taudis, accents incompréhensibles, c’était pas simple.
Ces jours-là, on commença à croiser des cyclistes globe-trotters qui avaient eu la même idée que nous. Le premier, Marcus, suisse-allemand fraîchement débarqué pour plusieurs mois en direction de l’Argentine, nous fonça droit dessus lors d’une pause-café en bord de route. On ne le savait pas encore, mais on allait adorer le revoir ensuite.

Le second, un uruguayen aux airs du Che avec sa chemise en jean et son chapeau de gaucho, sirotait une bière de bon matin avec des gars du coin. Chacun sa dégaine, on vivait tous un peu la même chose, et c’était toujours un plaisir de s’arrêter pour taper la causette.
Puis après Huallanca et le scandale du billet déchiré au petit-déjeuner (Ah, le Pérou !), on franchit le profond Canyon del Pato aux 50 tunnels, avant d’atteindre la terre promise. Oui, parce que là-haut, à 3000 mètres au-dessus de l’océan que l’on avait quitté il y a si peu, après tout ce sable et ces roches, nous découvrîmes, enchantées, un plateau vert vert vert, baigné de lumière, avec en fond les pics éclatants de la cordillère blanche, qui, fort heureusement, avait attendu notre arrivée avant de laisser fondre ses derniers glaciers.
A Caraz, nous allions déjà poser les vélos quelques jours, enchantées par l’ambiance de cette bourgade de montagne aux gens (et chiens!) adorables, au marché totalement addictif avec ses mille fruits et légumes, patates, fromages artisanaux, aux lagunes alentours dingues dingues dingues, et au diabolique Pisco Sour !