A Uyuni, nous rêvions d’une douche chaude et d’un lit moelleux, dans une piaule propre à l’abri du vent. Un peu de réconfort avant de repartir de plus belle à l’assaut du désert. Alors malgré la poussière, les 4×4 de touristes qui nous taillaient des shorts, et les chiens errants, nous étions aux anges en atteignant la ville. On n’avait beaucoup entendu parler d’une maison de cyclistes qui avait ouvert ses portes à peine un an plus tôt. Elle valait sacrément le détour paraissait-il, et depuis un bon moment nous attendions de découvrir ce petit cocon au milieu du désert.
Nous allâmes donc frapper à la porte de la Casa Pingui, où trois cyclistes allemands avaient déjà posé leurs sacoches : Oliver, Sarah et Patrick. Max, boulanger et gardien des lieux (chouette, du pain frais !) nous ouvrit la porte. C’était une vieille maison à la bolivienne, avec plusieurs pièces ouvertes sur un patio central. Sauf que là, les murs avaient pris les couleurs des cyclistes passés plus tôt. C’était lumineux, chaleureux, coloré ! Au milieu, un arbre, et deux hamacs, pour flâner au soleil. Dans un coin, un petit atelier pour bricoler les vélos, et au fond, une petite cuisine, sommaire mais accueillante. C’était parfait… Jusqu’à ce que Max nous ouvre la dernière pièce dispo, où nous allions pouvoir poser nos… matelas. Pas de fenêtre ou presque, pas de meuble, évidemment pas de lit, et une forte odeur d’essence, la pièce n’avait pas dû être ouverte depuis un moment. On voyait déjà notre douche chaude s’envoler… Ou plutôt notre serviette, qui très vite vola au vent qui s’immisçait par les trous de la toiture de la douche FROIDE. On apprit plus tard comment ouvrir l’eau chaude, avec un petit coup de jus en prime si par mégarde on tournait le robinet ailleurs que par son petit bout de scotch.
Cette fois encore, on ne sait pas trop pourquoi, on s’installa quand même, malgré l’odeur d’essence, le sol trop dur les courants d’air. Le lendemain, encore couchées, on entendit des voix dans le patio. Beaucoup de voix. De nouveaux cyclistes fraîchement débarqués ? Impossible, aucun cycliste ne terminerait sa journée de vélo à 8-9 heures du matin. Et bien si. Ceux qui viennent en bus de La Paz pour traverser le salar… Ou ceux qui finissent la traversée du salar en bus, les yeux brûlés par le soleil d’avoir pédalé sans lunettes adaptées. C’est ainsi que de 5 (+Max), nous nous retrouvâmes à 10. Il y avait Javier, cycliste américain ramené en « mission sauvetage » à Uyuni par Alex, sympathique français du Mans. Ils s’étaient retrouvés à camper ensemble au pied de l’îlot d’Incahuashi, où nous étions passé quelques jours plus tôt. Dans la nuit, Javier avait réveillé Alex, car ses yeux le brûlaient, et il ne voyait plus. C’est ce qui arrive quand on traverse le salar sans lunettes de soleil, mais lui n’en mettait de toute façon jamais… Alex avait dû intercepter l’unique bus qui fait la jonction « Incahuashi – Uyuni » de bon matin, Javier temporairement aveugle étant bien incapable de poursuivre à vélo. Trois autres cyclistes allemands étaient aussi de la partie, un jeune couple dont on n’a pas retenu les noms, et Heike, la cinquantaine, qui souriait beaucoup et posait toujours d’étranges questions.




C’est ainsi que la Casa Pingui devint notre « auberge bolivienne ». Ça parlait allemand, français, anglais, espagnol, et chacun faisait sa vie tranquillement, entretien des vélos, cuisine, écriture des blogs, préparatifs de départ et discussions au soleil sans voir le jour passer. Tout était prétexte à un autre café, et même si les sujets évoqués en allemand nous échappaient complètement, l’ambiance y était chaleureuse et reposante. On partait faire le marché, grignoter un bout en ville, mais le reste du temps nous ne sortions pas beaucoup. Bientôt, l’odeur d’essence s’était envolée, et notre pièce vide sans fenêtre s’avéra salvatrice pour Javier qui souffrait des yeux au moindre rayon de soleil. Chaque jour, nous devions repartir le lendemain, et de fil en aiguille notre pause d’un ou deux jours en dura plutôt trois ou quatre. Le couple d’allemands fraîchement débarqués avait déjà filé vers le salar, et un cycliste colombien avait rejoint la bande, mais lui dormait le jour et fumait tard dans la nuit, si bien que nous ne le vîmes pas beaucoup.
Quand nous quittâmes Uyuni pour aller affronter la fameuse route des lagunes dans la région du Sud Lipez, en compagnie d’Alex à la bonne humeur inébranlable, c’était comme repartir en mer après une escale au port.

Nous étions partagées quant à nos expériences passées dans les casas de ciclistas. Cette fois-ci, c’avait été parfait pour se ressourcer entre deux bouts de traversée de l’univers merveilleux mais hostile qu’est l’altiplano bolivien.

! Gracias Casa Pingui !
Très sympathique narration de votre périple bolivien. Bravo les filles. Bisous
Envoyé de mon iPhone
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